Une année européenne #38 min read

Débuté en mai 2018, ce journal de bord plus particulièrement axé sur les enjeux de souveraineté, retrace mois par mois sur une période de 1 an aboutissant aux élections au Parlement Européen, progrès engagés, éventuelles reculades, qui feront le résultat que nous connaitrons aux élections du 26 mai 2019.

L’Europe : l’alternative au chaos

Donald Trump continue de souffler le chaud et le froid sur les relations politiques internationales, brandissant les barrières tarifaires qu’il compte mettre en place. Il intime au Royaume-Uni de quitter au plus vite le marché unique en optant pour un « hard Brexit » en vue de nouer plus facilement un accord bilatéral Etats-Unis/Royaume-Uni.

La confusion perdure au Royaume Uni, la ligne de partage remainers/brexitersfracture tous les groupes, des ministres se démettent pour ne pas se déjuger tandis que Theresa May cherche le soutien des européens en agitant le spectre d’un « no-deal » qui serait « un très mauvais signal en ces temps de montée du sentiment protectionnisme » déclare Dominic Raab, Secrétaire d’Etat britannique à la sortie de l’UE.

L’Autriche a pris la présidence du Conseil faisant du contrôle de l’immigration sa priorité.

Même priorité affichée par l’Italie et les pays du Visegrad.

Leaders polonais et hongrois revendiquent le caractère chrétien de l’Europe et, récemment, la Pologne, en quête d’une main d’œuvre « catholique », a lancé un appel aux Philippines. Le Président hongrois, Victor Orban s’en prend à Emmanuel Macron dont il critique la politique d‘intégration européenne.

France, Espagne, Portugal font front commun sur ces questions, appelant à plus de solidarité en Europe dans le contrôle des flux migratoires.

Le Brexit, Trump, le regain nationaliste ont eu raison du multilatéralisme ; chacun mise désormais sur des accords bilatéraux, les relations internationales se font au gré des circonstances au risque de verser dans l’arbitraire et l’aléatoire.

Alors oui, face au chaos grandissant, plus que jamais, progressistes et libéraux européens doivent s’unir et se souder pour affirmer les valeurs d’une Europe humaniste et démocratique qui va de l’avant.

L’Europe a t-elle la capacité de se relancer en l’état?

La France, par la voix de son chef d’état, plaide pour une autonomie stratégique accrue en matière de sécurité et de défense, d’approvisionnement énergétique, d’innovation, de numérique et pour davantage de stabilité économique, sociale et environnementale.

Davantage d’Europe certes mais dans quelle configuration et sous quelle gouvernance ?

Lors de sa participation à la consultation citoyenne à Lisbonne, Emmanuel Macron a déclaré « le tandem franco-allemand permet de créer les bases de compromis pour permettre au reste de l’Europe d’avancer…je propose une gouvernance à plusieurs vitesses ». Cette Europe des 3 cercles concentriques se définit selon la volonté des pays d’aller vers plus ou moins d’intégration.

Sur le plan de la Défense de l’Europe,

Un sommet de l’OTAN s’est tenu à Bruxelles du mercredi 11 au jeudi 12 juillet. De cette rencontre, on retiendra surtout les critiques adressées par le Président étasunien Donald Trump aux pays d’Europe, l’Allemagne en tête, auxquels il a reproché de ne pas consacrer les 2% du PIB à la défense (un seuil fixé par l’OTAN). Toutefois, Trump a, par la suite, nuancé ses propos en qualifiant l’OTAN de « plus grande alliance de tous les temps ».

Mi-juillet, à l’occasion du salon aéronautique de Farnborough, la Grande-Bretagne a annoncé le lancement de son projet d’avion de combat du futur, TEMPEST, en possible coopération avec d’autres pays tel l’Italie…

Une annonce de nature à rassurer leurs concitoyens sur la pérennité de leur BIDT et, un sacré coup de bluff face au projet franco-allemand, SCAF, Système de Combat Aérien du Futur, les britanniques ayant du mal à boucler leur budget de la défense.

Quoi qu’il en soit, l’Europe de la défense ne se fera pas sans les Britanniques, eu égard à leurs capacités tant technologiques, industrielles, qu’opérationnelles, ainsi qu’à l’effort, à hauteur de 2% du PIB, qu’ils consacrent à la défense.

La coopération bilatérale qui unit nos deux pays est toujours aussi active :

Du 1er au 15 juin, l’exercice d’entraînement « Catamaran 2018 » de la CJEF (Combined Joint Expeditionary Force) a réuni l’Armée de terre française et la RAF britannique, ainsi que les marines des deux pays, à Quiberon (Morbihan). Dirigée par le contre-amiral Olivier Lebas depuis le Bâtiment de Projection et de Commandement (BPC) Tonnerre, l’exercice s’est déroulé en deux phases (entraînement au large, puis exercice sur terrain civil) dans l’optique d’une opérationnalisation de la CJEF.

– Les exercices CJEF et le fonctionnement instaurant dans le cadre du traité de Lancaster une dépendance mutuelle en matière d’armement au sein du premier missilier européen MBDA ont très certainement contribué au succès de l’opération Hamilton, menée conjointement par la France, les Etats Unis et la Grande Bretagne ; l’opération Hamilton a eu pour but de détruire les installations d’armes chimiques en Syrie.

– C’est donc sans trop d’état d’âme que les britanniques ont décidé de se joindre à l’Initiative Européenne d’Intervention, IEI, (cf une année européenne #2) signée le 25 juin par 9 pays.

– L’enjeu est maintenant d’approfondir notre coopération dans le domaine des missiles. Initiative inédite, une mission d’information, dont j’ai l’honneur d’être co-rapporteur, commune aux 2 parlements « House of Commons » et l’Assemblée nationale travaille actuellement sur le sujet,.

A l’invitation du Conrad Adenauer Stiffung, j’ai eu l’occasion d’intervenir le 5 juillet à Strasbourg sur la politique européenne de défense. J’ai tenu à expliciter le bien-fondé de l’IEI afin de répondre aux critiques : « l’IEI, une tentative de la France pour saborder la PESCO. L’IEI, une initiative de plus alors que les EU Battle Groups n’ont été à ce jour impliqués dans aucun conflit ! »

D’où l’importance d’écouter et de revenir sur ce en quoi l’IEI est complémentaire de la CSP (Coopération Structurée Permanente = PeSCo Permanent Structured Cooperation) plus orientée vers le besoin capacitaire que l’opérationnel, qu’elle ne compromet en rien notre engagement dans l’OTAN, qu’il s’agit de se préparer à intervenir en secours aux populations civiles ou lors de conflits de moindre intensité sur des théâtres où les américains n’iront pas et afin de protéger nos frontières méridionales et de renforcer la lutte contre le terrorisme…

De modalité flexible, l’IEI est essentiellement basée sur la volonté et les capacités des pays participants. Elle vise à une planification froide à partir d’un certain nombre de scenarii pré-déterminés par les Etats Majors et doit engendrer des exercices d’entrainement des forces des pays contributeurs à l’instar de l’EATC, European Air Transport Command ou du CJEF.

Pour autant, pour être crédible, l’IEI devra se faire tangible, escomptons que la première rencontre entre Chefs états-majors, prévue en octobre prochain, se fera dans cet esprit.

Rendez vous pour “Une Année Européenne #4” le mois prochain !

Amitiés,

Natalia Pouzyreff

Share This